jeudi 21 octobre 2010

Duerme negrito - Mercedes Sosa

Duerme, duerme, negrito,
Que tu mama está en el campo
Negrito…

Dort, petit noir- chanson traditionnelle des Caraïbes - Mercedes Sosa

Chanson traditionnelle répertoriée par Atahualpa Yupanqui à la frontière du Venezuela et de la Colombie. Elle se présente comme une berceuse, mais elle parle de la vraie vie. Elle est un exemple remarquable de ceux qui chantent sous la domination et qui parviennent tout de même à dire ce qu'ils doivent dire.

dimanche 3 octobre 2010

Le très grand Eduardo Galeano

Quelques lignes de ce très grand bonhomme qu'est Eduardo Galeano. Ces lignes sont tirées de "El libro de los abrazos", c'est à dire "Le livre des étreintes" publié en 1989.
Lien vers "El libro de los abrazos"

Célébration de la subjectivité
Il y avait déjà un bon moment que j'écrivais Memoria del fuego et plus j'écrivais plus j'entrais à l'intérieur des histoires que je contais. Maintenant, j'avais de la difficulté à distinguer le passé du présent; ce qui avait été continuait à être, et était présentement tout près de moi et écrire était ma façon de frapper et d'embrasser. Pourtant, on suppose que les livres d'histoire ne sont pas subjectifs.

mardi 14 septembre 2010

Des déformations semblables à celles des embryons humains

Des déformations semblables à celles des embryons humains
Cet article est paru le 17 août 2010 dans Pagina/12. Il semble qu'il n'était pas digne de nos salles de nouvelles, puisque je n'en ai vu aucun écho dans les média locaux (Montréal). Le titre original est : “Deformaciones similares a las de embriones humanos” paru dans Pagina/12, un quotidien argentin. Le lien est : Deformaciones similares a las de embriones humanos . 

Quel 11 septembre?

Le 11 septembre 1973, la CIA mettait à exécution son coup d'état contre Salvador Allende, démocratiquement élu à la tête du gouvernement chilien. On le sait il fut remplacé par Pinochet, dictateur sanguinaire mis en place par le gouvernement des États Unis.
Dans cet article publié par Pagina/12, José Pablo Feinmann nous propose de réfléchir aux parallèles entre les deux événements.





Hier (le 11 septembre), ils ont tué Savaldor Allende
Par José Pablo Feinmann, paru dans Pagina/12, le 12 septembre 2010.

mardi 7 septembre 2010

L'Ange de la bicyclette - Leon Gieco / Luis Guverich

En décembre 2001, l'Argentine s'est trouvée plongée dans une crise sans précédent. Le système financier du pays a fait faillite. Cinq présidents se sont succédées en deux mois. Les gens se sont retrouvés du jour au lendemain dépouillés de leurs avoirs, les argents déposés dans les banques ayant été saisies. Claudio «Pocho » Lepratti s'occupait d'une cantine communautaire pour les enfants du quartier. Il était bien connu et venait toujours travailler en bicyclette. La cantine se trouva prise dans une manifestation populaire et une répression policière se mit en marche.

Le 19 décembre 2001, la ville de Rosario s'est retrouvée sans L'Ange de la bicyclette. Claudio « Pocho » Lepratti, âgé de 35 ans, qui su faire du compromis et de la solidarité une forme de vie, est tombé, assassiné par la police, fusillé par un tir qui lui fit éclater la trachée, effectué par une chevrotine de plomb provenant d'un fusil de calibre 12,70, tiré par le policier Estaban Velasquez à sept mètres de distance.

Pocho, debout sur le toit de l'école où il préparait la nourriture pour les élèves, a tenté d'arrêter la répression démesurée contre les gens. Il a crié à un patrouilleur qui se dirigeait vers la foule en tirant en l'air et le véhicule de police fit demi tour. Les officiers descendirent en pointant leurs armes sur Pocho qui a crié:

Baissez les armes! Ici il n'y que des gosses qui mangent.

Le tir l'a jeté en arrière et son corps s'effondra sur le toit de planches.

Pendant les semaines qui ont suivi les mûrs de la ville étaient couverts de graffitis représentant un ange à bicyclette.

El Angel de la bicicleta -Leon Gieco / Luis Guverich

El 19 de diciembre de 2001, la ciudad de Rosario se quedó sin el Ángel de la Bicicleta. Claudio “Pocho” Lepratti, de 35 años de edad, quien supo hacer del compromiso y la solidaridad una forma de vida, cayó asesinado por la policía, fusilado de un tiro que le reventó la tráquea, efectuado con un perdigón de plomo de una escopeta calibre 12,70, disparado por el policía Esteban Velásquez a siete metros de distancia.

Pocho, parado sobre el techo de la escuela donde preparaba la comida para los alumnos, intentó frenar la represión desmedida contra la gente. Gritó a un patrullero que se dirigía a la multitud disparando tiros al aire, y el vehículo policial dio la vuelta. Los oficiales se bajaron apuntando sus armas a Pocho, quien gritó:

-¡Bajen las armas! Acá sólo hay pibes comiendo.

El disparo lo arrojó hacia atrás y su cuerpo se desplomó sobre el techo de chapa.

samedi 14 août 2010

Solo le pido a dios - Leon Gieco et Mercedes Sosa

Solo le pido a Dios
Que el dolor no me sea indiferente
Que la reseca muerte no me encuentre
Vacio y solo sin haber echo lo suficiente

Como un tren - Leon Gieco y Luis Guverich

Soy como un tren
que atraviesa las tempestades camino al sol
llevo la marca de todos estos tiempos libres
o de encierros, o de encierros.

lundi 9 août 2010

La estrella azul - Carlos Oscar « Peteco » Carabajal - Mercedes Sosa.

¿Dónde esterá la estrella azul?
Esa estrellita del alma…
Sus ojos suelen brillar
Perdidos en la inmensidad.

L'étoile bleue - Carlos Oscar « Peteco » Carabajal - Mercedes Sosa

Où se trouve l’étoile bleue?
Cette petite étoile de l’âme…
Ses yeux ont l'habitude de briller
Perdus dans l’immensité.

Je demande seulement à Dieu - Leon Gieco - Mercedes Sosa

Je demande seulement à Dieu
Que la douleur ne me soit pas indifférente
Que la mort desséchée ne me rencontre pas
Vide et seul sans en avoir fait suffisamment

Comme un train (Como un tren) - Leon Gieco et Luis Gurevich

Je suis comme un train
Qui traverse les tempêtes en chemin vers le soleil
Je porte la marque de tous ces moments de liberté
Ou de prison, ou de prison.

mercredi 4 août 2010

De quoi rit-on? - Mario Benedetti

(Je serai curieux) 

Dans une précise 
photo du journal 
monsieur le ministre 
de l'impossible 

¿De que se rie? Mario Benedetti

(Seré curioso) 

En una exacta 
foto del diario 
señor ministro 
del imposible 

mardi 3 août 2010

Tout change, Julio Numhauser, Mercedes Sosa

Le superficiel change
et le profond change aussi
elle change, la façon de penser
tout change en ce monde
le climat change avec les années
le berger change son troupeau
et puisque tout change
il n'est pas étrange que moi-même je change.

Todo cambia, Julio Numhauser, Mercedes Sosa

Cambia lo superficial
cambia también lo profundo
cambia el modo de pensar
cambia todo en este mundo
cambia el clima con los años
cambia el pastor su rebaño
y así como todo cambia
que yo cambie no es extraño. 

Le jeu auquel nous jouons - Juan Gelman

S'ils me donnaient à choisir, je choisirais
cette santé de savoir que nous sommes très malades
ce bonheur d'avancer aussi malheureux.

El juego en que andamos - Juan Gelman

Si me dieran a elegir, yo elegiría

esta salud de saber que estamos muy enfermos,

esta dicha de andar tan infelices.


mercredi 28 juillet 2010

Les disparus - Mario Benedetti

(Selon Wikipédia, les "desaparecidos" sont des personnes victimes de disparition forcée, qui ont été secrètement arrêtées et tuées en Argentine pendant la "guerre sale", entre 1976 et 1983 pendant la Dictature militaire en Argentine (1976-1983) du général Videla. Certaines sources en évaluent le nombre à 30 000)
Ils sont quelque part / concertés
déconcertés / sourds
se cherchant / nous cherchant
bloqués par les signes et les doutes
contemplant les grilles des places

Desaparecidos - Español - Mario Benedetti

Están en algún sitio / concertados
desconcertados / sordos
buscándose / buscándonos
bloqueados por los signos y las dudas
contemplando las verjas de las plazas
los timbres de las puertas / las viejas azoteas

Merci à la vie - Violeta Parra - Mercedes Sosa

Merci à la vie qui m'a tant donné.
Elle m'a donné deux yeux; quand je les ouvre
Je distingue parfaitement le noir du blanc
Et là-haut le fond étoilé du ciel
Et parmi la foule, l'homme que j'aime.

Merci à la vie qui m'a tant donné.
Elle m'a donné l'ouïe qui avec toute son étendue
Enregistre nuit et jour grillons et canaris,
Marteaux, turbines, aboiements, orages,
Et la voix si tendre de mon bien-aimé.

Gracias a la vida - Violetta Parra - Mercedes Sosa

Gracias a la vida que me ha dado tanto.
Me dio dos luceros que, cuando los abro,
perfecto distingo lo negro del blanco
y en el alto cielo su fondo estrellado
y en las multitudes el hombre que yo amo.

Allende - Français - Mario Benedetti

(Salvador Allende, président démocratiquement élu du Chili. Selon Wikipédia: Avec le soutien de la CIA et de Agustín Edwards Eastman2, le coup d'État du 11 septembre 1973 mené par Augusto Pinochet mit fin à son mandat par la force3 en renversant son gouvernement pour instaurer une dictature militaire. Dans le palais de la Moneda, sous les bombes putschistes, il semble qu'Allende se soit suicidé.)
Pour tuer l'homme de la paix
pour frapper son front libre de cauchemars
ils ont dû se transformer en cauchemar
pour vaincre l'homme de la paix
ils ont dû rassembler toutes les haines
et en plus les avions et les tanks
pour battre l'homme de la paix
ils ont dû le bombarder le mettre en flamme
parce que l'homme de la paix était une forteresse

Allende - Español - Mario Benedetti

Para matar al hombre de la paz
para golpear su frente limpia de pesadillas
tuvieron que convertirse en pesadilla
para vencer al hombre de la paz

Bandonéon - Français - Mario Benedetti

(Note du traducteur: Anibal Pichuco Troilo a été joueur de bandonéon, compositeur et directeur d'orchestre de tango, argentin.)
Cela me réjouit de le confesser
mais la vie est aussi un bandonéon
il y en a qui soutiennent que Dieu en joue
mais je suis sur que c'est Troilo
puisque Dieu joue à peine la harpe et plutôt mal


Bandoneón - Español - Mario Benedetti

Me jode confesarlo
pero la vida es también un bandoneón
hay quien sostiene que lo toca dios
pero yo estoy seguro que es troilo
ya que dios apenas toca el arpa  y mal fuere




vendredi 23 juillet 2010

À gauche du chêne (A la izquierda del roble) - Mario Benedetti

À gauche du chêne





Je ne sais pas si cela vous est déjà arrivé
mais le Jardin Botanique est un parc endormi
dans lequel on peut se sentir arbre ou prochain
toujours et seulement quand s'accomplit une condition préalable.
Que la ville existe tranquillement au loin. 
Le secret est de s'appuyer disons sur un tronc
et d'entendre au travers de l'air qui contient des bruits morts
comment galopent les tramways sur Millan et Reyes.

A la izquierda del roble (À gauche du chêne) - Mario Benedetti

A la izquierda del roble
No sé si alguna vez les ha pasado a ustedes
pero el Jardín Botánico es un parque dormido
en el que uno puede sentirse árbol o prójimo
siempre y cuando se cumpla un requisito previo.
Que la ciudad exista tranquilamente lejos.

mercredi 14 juillet 2010

Ne t'en sauve pas (No te salves) - Mario Benedetti

Ne t'en sauve pas

Ne demeure pas immobile
au bord du chemin
ne congèle pas la joie
n'aime pas sans entrain
ne t'en sauve pas maintenant
ni jamais

No te salves (Ne t'en sauve pas) - Mario Benedetti

No te salves

No te quedes inmóvil
al borde del camino
no congeles el jubilo
ni quieras con desgana
no te salves ahora
ni nunca

Solitudes (Soledades) - Mario Benedetti


Solitudes


Ils ont raison,
ce bonheur
avec au moins une majuscule
n'existe  pas
ah, mais s'il existait avec une minuscule
il serait semblable à notre  brève présolitude



Soledades (Solitudes) - Mario Benedetti

Soledades




Ellos tienen razón
esa felicidad
al menos con mayúscula
no existe
ah pero si existiera con minúscula
seria semejante a nuestra breve
presoledad

Arc en Ciel (Arco iris) - Mario Benedetti

Des fois
naturellement
vous souriez
et peu importe
que réellement
vous soyez jolie
ou laide
vieille
ou jeune
beaucoup
ou peu

Arco iris (Arc en Ciel) - Mario Benedetti

A veces
por supuesto
usted sonríe
y no importa lo linda
o lo fea
lo vieja
o lo joven
lo mucho
o lo poco
que usted realmente
sea

lundi 28 juin 2010

Concerto pour une seule voix (Concerto para una voz) - Joachim Rodrigo-Viré


Appelle-moi quand tu dois sentir mon affection
quand le cœur te fait mal
quand se croisent tes yeux
avec les miens
quand tu écoutes ma chanson
ou quand tu ne peux pas trouver ton chemin
Appelle-moi et tu verras
que je suis la lumière qui se transforme en femme
je suis l'origine de l'être
la gestation du monde que tu dois avoir

embrasse-moi ainsi
tu recommenceras à vivre
tu me reviendras
par amour

Pourquoi est-ce ainsi?
Pourquoi ce sera toujours ainsi?
Chaque fois que tu m'appelles
Amour

jeudi 24 juin 2010

Concierto para una voz (Concerto pour une seule voix) Joachim Rodrigo-Viré

Concierto para una Voz
Concierto Aranjuez, Adagio 2e mouvement
Joachim Rodrigo-Viré
Tania Libertad


Llamame, cuando tengas que sentir mi cariño,

cuando te duela el corazón,
cuando se crucen por tus ojos
los míos...

cuando escuches mi canción
o cuando no puedas encontrar tu camino
llamame y veras..
que soy la luz que se transforma en mujer...
soy... el origen del ser...
gestación del mundo que has de tener

abrazame así...
y... volverás a ser feliz
volverás a revivir
volverás a mi...

por amor...

Porque es así?
Porque siempre será así?
Cada vez que tu me llames...
Amor.

vendredi 18 juin 2010

Che 97 - Français - Mario Benedetti

Che 1997
Ils l'ont couvert d'affiches / de pancartes
de voix sur les murs
d'offenses rétroactives
d'honneurs à contretemps
ils l'ont transformé en objet de consommation
en souvenir banal
en hier sans retour
en rage embaumée

Ils ont décidé de l'utiliser comme épilogue
comme dernier Thule de l'innocence vaine
comme annexe archétype de saint ou satan
et peut-être ont-ils résolu que la seule façon
de s'en déprendre
ou de le laisser à la dérive
est de le vider du feu
de le convertir en un héros
de marbre ou de plâtre
et par conséquent immobile
ou mieux comme mythe
ou silhouette ou fantasme
du passé écrasé

cependant les yeux du che qui ne se ferment pas
regardent comme s'ils ne pouvaient pas ne pas regarder
étonnés peut-être que le commandement ne comprenne pas
que trente ans après il continue à combattre
doux et tenace pour le bonheur de l'homme


Traduction, Jean McComber juin 2010


Hagamos un trato (Faisons un marché) - Mario Benedetti

Hagamos un trato

Cuando sientas tu herida sangrar
cuando sientas tu voz sollozar
cuenta conmigo
(de una canción de Carlos Puebla)

Compañera
puede contar
conmigo
no hasta dos
o hasta diez
sino contar
conmigo
si alguna vez
advierte
que la miro a los ojos
y una veta de amor
reconoce en los míos
no alerte sus fusiles
ni piense qué delirio
a pesar de la veta
o tal vez porque existe
usted puede contar
conmigo
si otras veces
me encuentra
huraño sin motivo
no piense qué flojera
igual puede contar
conmigo
pero hagamos un trato
yo quisiera contar
con usted
es tan lindo
saber que usted existe
uno se siente vivo
y cuando digo esto
quiero decir contar
aunque sea hasta dos
aunque sea hasta cinco
no ya para que acuda
sino para saber
a ciencia cierta
que usted sabe que puede
contar conmigo.

Ahi nomas (Juste là) - Mario Benedetti

AHÍ NOMÁS

En el manso dolor que te perturba
cuando asumes lejano cómo vibra o jadea
la inocencia del otro
en la desolación convertida en crisálida
en el silencio lleno de palabras nonatas
en el hueco de llanto inmerecido
en tu ausencia de dioses
en la asunción de tus mejores miedos
en tus cenizas de utopía
en tu fe de a pesar / de sin embargo
ahí nomás
precisamente ahi
se oculta / resiste / permanece
la caverna profunda / inexpugnable
que algunos / unos pocos
dicen que es la conciencia

Mario Benedetti, El olvido está lleno de memoria Santillana Ediciones Generales, Mexico, 2005 (2004), p. 456.

Juste là (Ahi no mas) - Mario Benedetti

JUSTE LÀ

Dans la paisible douleur qui te perturbe

quand tu saisis au loin comment vibre ou halète

l’innocence de l’autre
dans la désolation muée en chrysalide

dans le silence plein de mots non-nés

dans le creux des pleurs immérités

dans ton absence de dieu

dans l’acceptation de tes meilleures peurs

dans tes cendres d’utopie

dans ta foi de malgré / de cependant

juste là

précisément là 

se cache / résiste / demeure
la caverne profonde / inexpugnable

que certains / quelques-uns

disent être la conscience



(traduction inédite de Nathalie Vuillemin, 2009 revisitée par Jean McComber, 2010)

Che 1997 - Español - Mario Benedetti

Mario Benedetti

Che 1997
Lo han cubierto de afiches /de pancartas
de voces en los muros
de agravios retroactivos
de honores a destiempo
lo han transformado en pieza de consumo
en memoria trivial
en ayer sin retorno
en rabia embalsamada

han decidido usarlo como epilogo
como última thule de la inocencia vana
como anejo arquetipo de santo o satanás
y quizás han resuelto que la única forma
de desprenderse de él
o dejarlo al garete
es vaciarlo de lumbre
convertirlo en un héroe
de mármol o de yeso
y por lo tanto inmóvil
o mejor como mito
o silueta o fantasma
del pasado pisado

sin embargo los ojos incerrables del che
miran como si no pudieran no mirar
asombrados tal vez de que el mando no entienda
que treinta años después sigue bregando
dulce y tenaz por la dicha del hombre

Asunción de tí (T'accepter) - Mario Benedetti

Asunción de tí


Quién hubiera creído que se hallaba
sola en el aire, oculta,
tu mirada.
Quién hubiera creído esa terrible
ocasión de nacer puesta al alcance
de mi suerte y mis ojos,
y que tú y yo iríamos, despojados
de todo bien, de todo mal, de todo,
a aherrojarnos en el mismo silencio,
a inclinarnos sobre la misma fuente
para vernos y vernos
mutuamente espiados en el fondo,
temblando desde el agua,
descubriendo, pretendiendo alcanzar
quién eras tú detrás de esa cortina,
quién era yo detrás de mí.
Y todavía no hemos visto nada.
Espero que alguien venga, inexorable,
siempre temo y espero,
y acabe por nombrarnos en un signo,
por situarnos en alguna estación
por dejarnos allí, como dos gritos
de asombro.
Pero nunca será. Tú no eres ésa,
yo no soy ése, ésos, los que fuimos
antes de ser nosotros.
Eras sí pero ahora
suenas un poco a mí.
Era sí pero ahora
vengo un poco a ti.
No demasiado, solamente un toque,
acaso un leve rasgo familiar,
pero que fuerce a todos a abarcarnos
a ti y a mí cuando nos piensen solos.

2

Hemos llegado al crepúsculo neutro
donde el día y la noche se funden y se igualan.
Nadie podrá olvidar este descanso.
Pasa sobre mis párpados el cielo fácil
a dejarme los ojos vacíos de ciudad.
No pienses ahora en el tiempo de agujas,
en el tiempo de pobres desesperaciones.
Ahora sólo existe el anhelo desnudo,
el sol que se desprende de sus nubes de llanto,
tu rostro que se interna noche adentro
hasta sólo ser voz y rumor de sonrisa.

3

Puedes querer el alba
cuando ames.
Puedes
venir a reclamarte como eras.
He conservado intacto tu paisaje.
Lo dejaré en tus manos
cuando éstas lleguen, como siempre,
anunciándote.
Puedes
venir a reclamarte como eras.
Aunque ya no seas tú.
Aunque mi voz te espere
sola en su azar
quemando
y tu dueño sea eso y mucho más.
Puedes amar el alba
cuando quieras.
Mi soledad ha aprendido a ostentarte.
Esta noche, otra noche
tú estarás
y volverá a gemir el tiempo giratorio
y los labios dirán
esta paz ahora esta paz ahora.
Ahora puedes venir a reclamarte,
penetrar en tus sábanas de alegre angustia,
reconocer tu tibio corazón sin excusas,
los cuadros persuadidos,
saberte aquí.
Habrá para vivir cualquier huida
y el momento de la espuma y el sol
que aquí permanecieron.
Habrá para aprender otra piedad
y el momento del sueño y el amor
que aquí permanecieron.
Esta noche, otra noche
tú estarás,
tibia estarás al alcance de mis ojos,
lejos ya de la ausencia que no nos pertenece.
He conservado intacto tu paisaje
pero no sé hasta dónde está intacto sin ti,
sin que tú le prometas horizontes de niebla,
sin que tú le reclames su ventana de arena.
Puedes querer el alba cuando ames.
Debes venir a reclamarte como eras.
Aunque ya no seas tú,
aunque contigo traigas
dolor y otros milagros.
Aunque seas otro rostro
de tu cielo hacia mí.

Faisons un marché (Hagamos un trato) Mario Benedetti

Faisons un marché



Quand tu sens que saigne ta blessure
quand tu sens que ta voix sanglote
compte sur moi
(d'une chanson de Carlos Puebla)

Compagne
vous savez
que vous pouvez compter
sur moi
pas jusqu'à deux
ou jusqu'à dix
mais compter
sur moi
si quelque fois
vous remarquez
que je vous regarde dans les yeux
et vous reconnaissez dans les miens
une veine d'amour
n'alertez pas vos fusils
ne pensez pas quel délire
en dépit de la veine
ou peut-être parce qu'elle existe
vous pouvez compter
sur moi
si d'autres fois
vous me rencontrez
désagréable sans motif
ne pensez pas quelle paresse
également vous pouvez compter
sur moi
mais faisons un marché
j'aimerais compter
sur vous

Il est si beau
de savoir que vous existez
on se sent vivant
et quand je dis cela
je veux dire compter
que ce soit jusqu’à deux 
que ce soit jusqu’à cinq 
non pour que immédiatement vous accouriez
empressée à mon aide
mais pour savoir
de source sure
que vous savez que vous pouvez
compter sur moi.

El amor, las mujeres y la vida, Mario Benedetti, traduit par Jean McComber 2010

T'accepter (Asuncion de ti) - Mario Benedetti





T'accepter


1

Qui aurait cru qu'il se trouvait,
seul dans l'air, dissimulé,
ton regard.
Qui aurait cru cette terrible
occasion de naître déposée à la portée
de ma chance et de mes yeux
et que toi et moi nous irions, dépossédés
de tout bien, de tout mal, de tout,
nous enferrer dans le même silence,
nous incliner sur la même source
pour nous voir et nous voir
espionnés mutuellement dans le fond
tremblant depuis l'eau,
découvrant, prétendant atteindre
celle que tu étais derrière ce rideau
celui que j'étais derrière moi.
Et encore nous n'avons rien vu.
J'espère que quelqu'un viendra, inexorable,
toujours je le crains et je l'espère
et qu'il finisse par nous nommer dans un signe,
par nous situer dans quelque position
par nous laisser là, comme deux cris
de frayeur.
Mais jamais ce ne sera. Tu n'est pas celle-là,
je ne suis pas celui-là, ceux-là, ceux que nous avons été
avant d'être nous-mêmes.
Tu étais toi mais maintenant
tu rêves un peu à moi.
J'étais moi mais maintenant
je viens un peu à toi.
Pas trop, seulement un toucher,
peut-être un léger grattement familier,
mais qui nous force à nous embrasser
toi et moi quand nous nous pensons seuls.

2

Nous sommes parvenus au crépuscule neutre
là où le jour et la nuit se fondent et s'équivalent.
Personne ne pourra oublier ce repos.
Il passe sur mes paupières, le ciel facile
et me laisse les yeux vides de cité.
Ne pense pas maintenant au temps des aiguilles
au temps des pauvres désespoirs.
Maintenant existe seulement le désir dénudé,
le soleil qui se dégage de ses nuages de pleurs,
ton visage qui s'entre à l'intérieur de la nuit
jusqu'à être seulement voix et rumeur de sourire.

3

Tu peux vouloir l'aube
Tu peux
venir te réclamer comme tu étais.
J'ai conservé intact ton paysage.
Je le laisserai dans tes mains
quand celles-ci arriveront, comme toujours
t'annonçant.
Tu peux
venir te réclamer comme tu étais.
Même si déjà tu n'es pas toi.
Même si ma voix t'attend
seule dans son malheur
en brûlant
et que ton maître soit cela et bien plus.
Tu peux aimer l'aube
quand tu aimes.
Ma solitude a appris a t'arborer.
Cette nuit, une autre nuit,
tu y seras
et le temps giratoire recommencera à gémir
et les lèvres diront
cette paix maintenant cette paix maintenant.
Maintenant tu peux venir te réclamer
pénétrer en tes draps d'anxiété joyeuse,
reconnaître ton coeur tiède sans excuses,
les tableaux persuadés,
te savoir ici.
Il y aura pour vivre n'importe quelle fuite
et le moment de l'écume et le soleil
qui sont demeurés ici.
Il y aura pour apprendre une autre piété
et le moment du sommeil et l'amour
qui sont restés ici.
Cette nuit, une autre nuit
tu seras
tu seras tiède à la portée de mes yeux
éloignés déjà de l'absence qui nous appartient.
J'ai conservé intact ton paysage
mais je ne sais pas jusqu'où il est intact sans toi,
sans que tu lui promettes des horizons de brouillard
sans que tu lui réclames sa fenêtre de sable.
Tu peux vouloir l'aube quand tu aimes.
Tu dois venir te réclamer comme tu étais.
Même si déjà tu n'es pas toi,
même si tu amènes avec toi
la douleur et d'autres miracles.
Même si tu es un autre visage
de ton ciel jusqu'à moi.

Traduction par Jean McComber, juin 2010.